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Primo-accédant : pourquoi est-il si difficile de faire un emprunt immobilier ?

Primo-accédant : pourquoi est-il si difficile de faire un emprunt immobilier ?

On parle de primo-accédants pour désigner les ménages qui font l'acquisition d'un bien immobilier en tant que résidence principale pour la première fois, c'est-à-dire un logement qui doit être occupé au moins huit mois par an. De fait, les primo-accédants sont le plus souvent des ménages jeunes. Mais les primo-accédants peuvent aussi être ceux qui réalisent leur premier achat immobilier et qui sont locataires de leur résidence principale depuis au moins deux ans.

Si le statut de primo-accédant permet à certains ménages de bénéficier d'avantages, une TVA réduite par exemple pour l'achat d'un bien immobilier neuf, ou encore notamment des prêts immobiliers sans intérêt comme le prêt à taux zéro (PTZ), la conjoncture économique et financière actuelle rend plus difficile la capacité de ces ménages à pouvoir emprunter. Les conditions pour emprunter se sont aussi durcies depuis le début de l'année 2022. Conséquence : le nombre des prêts accordés pour acquérir un bien immobilier dans l'ancien, par exemple, a reculé de près de 23 % en septembre 2022 comparé au même mois de l'année dernière.

Une hausse des taux des crédits immobiliers qui s'intensifie

La hausse des taux d'intérêts des emprunts immobiliers est certainement la première cause des difficultés rencontrées par les ménages primo-accédants. La grande majorité d'entre eux ont en effet recours à un crédit immobilier pour acquérir leur première résidence principale, parce qu'ils ne se sont pas constitué la plupart du temps une épargne assez importante pour ne pas avoir à emprunter de grosses sommes, nécessaires à l'achat d'un bien immobilier. Les primo-accédants étant principalement des ménages jeunes en début de carrière, avec des revenus souvent peu élevés, et sans patrimoine.

Or, les taux d'intérêts, donc ceux appliqués pour emprunter et investir dans l'immobilier, sont très sensibles à la conjoncture économique et à la situation générale d'un pays ou de celle internationale. Les tensions sur les marchés financiers depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine et la hausse de l'inflation depuis le début de l'année 2022 (près de + 6 % en octobre 2022 par rapport à il y a un an) ont fait flamber les taux d'intérêts, qui s'adossent à l'augmentation des prix, avec pour conséquence l'augmentation en parallèle du coût total des emprunts immobiliers. Un problème pour les primo-accédants qui veulent emprunter d'autant plus que l'inflation devrait poursuivre son augmentation en 2023 (entre + 4 % et + 6 % selon différentes estimations).

De l'ordre de 1 % à 1,5 % maximum, des niveaux extrêmement bas qui ont permis aux acquéreurs d'emprunter plus facilement depuis le milieu des années 2000, les taux d'intérêts pratiqués aujourd'hui ont connu une hausse nette depuis 2021, et même une augmentation sans précédent en 2022, en particulier depuis le printemps dernier : + 10 points entre février et juin 2022, même + 18 points pour le mois de juillet et + 12 points en août.

Ainsi, au 3e trimestre 2022, le taux moyen d'un crédit (hors assurance) se situe à 1,79 % pour l'accession d'un bien immobilier neuf, comme ancien. Il est même de 1,88 % en septembre 2022, contre 1,04 % en septembre 2021. Une hausse des taux de crédits immobiliers qui devrait se poursuivre en 2023 pour atteindre 2,80 % en juin, mais qui devrait se stabiliser en 2024 selon les experts.

D'autre part, le taux d'endettement des ménages, aussi appelé taux d'effort, ne doit pas dépasser 35 % depuis une décision du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) applicable depuis le 1er janvier 2022. Cela veut dire que les primo-accédants, notamment, doivent pouvoir présenter un dossier solide à l'établissement financier auprès duquel ils souhaitent souscrire un emprunt immobilier : le montant de leurs mensualités de remboursement divisé par leur revenu disponible net avant impôts (leurs ressources moins les dépenses contraintes du ménage) ne doit pas dépasser les 35 %. Sinon, l'organisme prêteur estime que la demande d'emprunt, en particulier immobilier, présente des risques pour le budget des ménages, notamment celui de s'endetter. Avec la hausse des taux d'intérêts, ce taux d'effort est plus facilement atteint et rend plus difficile la capacité d'emprunter.

Une bonne nouvelle néanmoins : la hausse du taux d'usure

En parallèle de la hausse constatée des taux des crédits immobiliers, ce que l'on appelle le taux d'usure joue aussi sur la capacité d'emprunt des ménages, en particulier des primo-accédants qui réalisent leur projet d'achat d'un premier bien.

On parle de taux d'usure pour désigner le taux annuel effectif global (TAEG), auparavant appelé le taux effectif global (TEG), c'est-à-dire le taux maximum au-delà duquel un prêt ne peut pas être accordé. Ce taux d'usure, fixé à la fin de chaque trimestre pour le trimestre suivant par la Banque de France, assure aux ménages qui désirent emprunter de ne pas payer trop cher leur crédit.

Dans un contexte international incertain qui a des conséquences sur le pouvoir d'achat des ménages, mais aussi sur la hausse des taux des crédits immobiliers, la Banque de France a néanmoins fait un geste en direction des ménages désireux d'investir dans leur première résidence principale en relevant le taux d'usure pour la période du 1er octobre au 31 décembre 2022 à 3 %, contre 2,57 % au 3e trimestre 2022.

L'élévation de ce taux d'usure devrait permettre à davantage de ménages de voir leur demande de prêt accordé.

Une durée des emprunts immobiliers qui s'allonge

Même s'il n'est plus possible légalement depuis le 1er janvier 2022 d'emprunter sur une durée de plus de 25 ans, contre 27 ans auparavant, la durée des prêts immobiliers s'allonge aujourd'hui pour les ménages dont les primo-accédants. Ils s'endettent donc pour beaucoup plus longtemps en 2022, ce qui fait réfléchir beaucoup de ménages sur leur capacité à mobiliser leurs moyens financiers sur de si longues durées.

De plus, cet allongement de la durée de prêt ne leur permet pas d'emprunter davantage, ou en tous les cas pas autant qu'avant, en raison notamment de l'augmentation des taux d'intérêts qui font flamber le coût total d'un emprunt, hausse qui n'est pas compensée par l'allongement de la durée des emprunts immobiliers.

Comme l'indique l'Observatoire Crédit Logement/CSA, au 3e trimestre 2022, la durée moyenne des prêts accordés était de 241 mois, soit un peu plus de 20 ans, (environ 22 ans pour l’accession dans le neuf et 21 ans pour l’accession dans l’ancien). Depuis cet été, cette durée moyenne a même atteint un niveau jamais observé auparavant : 20,3 ans en septembre 2022, contre 13,6 ans en 2001. En conséquence, 65 % des prêts à l'accession notamment d'un premier bien immobilier octroyés en septembre 2022 l'ont été pour une durée comprise entre plus de 20 ans, mais surtout de 25 ans.

L'exigence d'un apport personnel plus élevé

Les conditions d'accès à un crédit immobilier se sont resserrées depuis 2020, et en particulier depuis janvier 2022 avec les préconisations du Haut Conseil de stabilité financière appliquées depuis. Parmi ces injonctions, l'exigence de disposer d'un apport personnel conséquent s'impose, d'autant plus que les prix de l'immobilier continuent de s'élever. C'est pourquoi, mécaniquement, l'apport moyen personnel des emprunteurs s'est accru de 42 % depuis 2019.

Les primo-accédants, en majorité des ménages jeunes, ne disposent que très rarement d'une épargne importante et sont le plus souvent les ménages qui ont les revenus les plus modestes, ceux également les plus touchés par l'inflation à l'œuvre actuellement. Ces ménages se retrouvent donc lésés par cette mesure qui peut avoir pour conséquence le refus de leur demande d'emprunt pour acquérir leur première résidence principale, et l'obligation de renoncer à leur projet.

Une offre de biens immobiliers au plus bas et des prix qui augmentent

Outre les considérations financières liées au coût plus élevé aujourd'hui des emprunts immobiliers, en particulier pour les ménages qui réalisent leur premier investissement, le marché de l'immobilier actuel n'est pas non plus favorables aux primo-accédants.

Les offres de biens accessibles se raréfient sur le marché. Comme l'indique l'Observatoire Crédit Logement/CSA, les prix de l'immobilier ont augmenté en France de 5,2 % entre septembre 2021 et septembre 2022. Concrètement, aujourd'hui, la surface habitable que peuvent acquérir les ménages est en moyenne d'environ 68 m2 au troisième trimestre 2022, 4 m2 de moins qu'au même trimestre de l'année 2021.

Au final, compte tenu du contexte économique national et international, des tensions belliqueuses actuelles, de l'inflation, et des conditions plus restrictives d'octroi des prêts immobiliers (en particulier la nécessité de disposer d'un apport personnel conséquent), la part des primo-accédants a déjà reculé en 2021 (63,7 %), année au cours de laquelle elle a atteint son niveau le plus bas depuis 2010 (72,7 %).

Par Valérie Schneider - Publié le 31/10/2022

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